Numéros d'urgence

Réseaux sociaux et cyberharcèlement. Comment se protéger ?

Harcelée sur Internet, Sarah n'a rien dit pendant de longs mois, par peur et par honte. Son histoire, c'est celle de trop nombreux adolescents piégés sur Internet par des copains d'école, par un proche ou un prédateur fantôme qui agit sur la toile. Désormais elle parle. Pour expliquer ce qui l'a conduite à envoyer des photos d'elle nue à son petit ami alors qu'elle n'avait que 14 ans et qu'elle lui faisait entièrement confiance.

Harcelée sur Internet, Sarah n’a rien dit pendant de longs mois...

Sarah raconte qu'en primaire elle se sentait moche, "la moche de la classe". Alors qu'elle a 12 ans, elle décide de se créer des comptes sur les réseaux sociaux. Elle essaie de se mettre en valeur et de poster des photos sur lesquelles elle se trouve belle et séduisante. Quand Eric, un garçon de son école, vient à elle pour la charmer, elle se sent pousser des ailes. Enfin un garçon la remarque et la trouve attirante. C'est principalement virtuel, car à l'école, ils ne se parlent pas en vrai. Mais peu importe, elle plaît ! 

Pendant quelques mois, ils discutent, créent une complicité,  s'envoient des messages qui ont le parfum des mots d'amour. Puis Eric commence à demander des photos d'elle nue, des "nudes" comme on dit. Eric lui explique que comme ils sont en couple depuis des semaines, il est normal de passer ce cap, que c'est "la base". Elle hésite et refuse. Il insiste. Il dit qu'elle peut avoir confiance en lui. À ce stade, ils ne se sont toujours pas parlé en vrai à l'école. D'ailleurs, ils ne se parleront jamais en vrai.

Il dit aussi que si elle n'a pas confiance, ils ne peuvent pas rester ensemble. Sarah a peur qu'il la quitte. Il insiste encore. Et encore. Et encore. Elle cède. Les demandes sont quotidiennes, parfois plusieurs fois par jour. Eric lui promet que tout ça restera entre eux, que les photos et les vidéos sont pour lui, rien que pour lui, parce qu'ils sont amoureux. Et puis arrive le jour où elle reçoit des messages par dizaine de ses copains et copines de classe. "Wouaaa Sarah: mais t'es carrément bonne en fait! Comment t'as osé! T'es vraiment une chaudasse en tout cas!". Eric avait tout publié, tout partagé. À des amis. Des amis d'amis. Et d'un seul coup, c'est la "terre entière" qui peut voir ses photos et ses vidéos intimes. Sarah pleure, se renferme et n'a plus goût à rien. Elle n'ose pas en parler, parce qu'elle sait qu'il ne fallait pas envoyer la première photo. Elle a cédé. C'est sa faute, pense-t-elle.

c'est la terre entière qui peut voir ses photos et ses vidéos intimes.

Aujourd'hui Internet occupe une énorme place dans notre vie. Si les réseaux sociaux sont généralement utilisés de manière positive et responsable par la grande majorité des jeunes, certaines pratiques peuvent engendrer des dommages importants. Le témoignage de Sarah en est le parfait exemple et malheureusement il en existe plein. De telles situations graves doivent attirer ton attention pour pouvoir mieux comprendre et agir.

Le cyberharcèlement, nous t'en avons déjà parlé. On peut le définir comme toute forme de harcèlement ( moqueries, violence…) qui fait appel aux technologies de la communication - réseaux sociaux, emails, forums, messageries, GSM, blogs - utilisés par des personnes pour embarrasser, menacer et insulter des victimes. Il se fait donc via Internet et le téléphone portable.

Le drame du cyberharcèlement, c'est que la persécution se poursuit en dehors des murs de l'école, elle devient permanente, 24h/24, 7j/7. Et c'est là que tout devient encore plus dramatique. Le cyberharcèlement ne s'arrête jamais. 

Il est devenu rare de se déconnecter à un moment de la journée. Ton smartphone t'accompagne partout et lorsque tu le lâches, ton ordinateur ou ta tablette ne sont jamais bien loin pour prendre la relève. Et donc, une fois ciblé, tu es  vulnérable à tout moment de la journée, même confortablement assis dans ton lit.

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S'afficher sur les réseaux sociaux

Véritable carte d'identité électronique, les réseaux sociaux te permettent de t'afficher, de montrer qui tu es, de te sociabiliser même si tu es timide. Ils répondent à une envie d'être populaire, d'appartenir à un groupe. Ça te permet d'être vu, de te mettre en valeur. Ça te donne l'impression d'être un peu important, de sortir de la banalité. Et puis c'est chouette de partager tes idées, de pouvoir t'exprimer et d'aller voir comment ça se passe chez les autres, de te comparer.

Ça te donne parfois aussi l'impression de te donner un pouvoir que tu n' as pas ailleurs, que tu réussis plus facilement à vaincre tes peurs. Les barrières et les limites sont moins présentes, tu arrives même plus facilement à faire des choses interdites. Tout ça est complètement normal!

Le seul hic, c'est qu'à l'âge où la réputation est hyper importante, les dangers des réseaux sociaux sont bien réels.

Les risques

L'absence de contact physique est l'une des caractéristiques des réseaux sociaux. C'est justement parce que les jeunes se sentent plus libres, plus forts qu'ils commettent des actes qu'ils n'auraient jamais envisagés dans la vie "réelle". Le fait d'être derrière un écran peut donner un sentiment d'impunité, même sans agir anonymement. On a l'impression que ce qu'on fait sur le net n'est pas grave. Ensuite, on ne perçoit pas directement les conséquences de certains actes ou paroles, et on ressent moins de peine pour les autres. Il faut donc être vigilant et être conscient des risques. 

Il est tout à fait normal d'avoir envie de montrer des images de ta vie, de les exposer de manière positive ou de montrer ta créativité. Il faut néanmoins que tu restes vigilant et éviter de trop t'exposer en publiant ton intimité. Les messages, photos, vidéos etc. peuvent rester indéfiniment sur Internet et donc être visibles de tous. C'est parce que beaucoup de jeunes ignorent les risques en étant un peu naïfs qu'ils s'exposent au cyberharcèlement.

Et cela peut aller très vite. Tu peux rapidement devenir la cible de malveillance et tomber sur quelqu'un qui s'amuse de ta souffrance. Certaines personnes manipulent même tout un groupe contre une seule personne. Les images envoyées ou publiées peuvent être récupérées de ton compte et utilisées contre toi. Les photos intimes que tu envoies à un copain ou une copine peuvent parfois être partagées et exposées à un grand nombre de personnes. Il peut arriver aussi qu'une personne enregistre des photos de toi sans que tu le saches ou que l'on crée un faux profil en ton nom. Il faut donc vraiment faire attention à ce que tu publies sur les réseaux et à ce que tu envoies à certaines personnes: tout peut être utilisé contre toi et une fois que ce matériel se retrouve sur la toile, c'est un cauchemar qu'il est très difficile de stopper.

Il faut que tu comprennes que les conséquences du cyberharcèlement sont réelles et qu'elles peuvent pousser les victimes à commettre des gestes irréparables. À court terme, la victime va s'isoler. Elle se referme sur elle-même, ressent de la honte, de la culpabilité et perd peu à peu confiance en elle. Il arrive souvent que cet état entraîne un décrochage scolaire et que la personne n'aille plus à l'école, parce qu'il devient trop difficile de faire face aux moqueries. Après, c'est l'escalade. Au fur et à mesure, parmi les conséquences les plus graves, il peut y avoir de l'automutilation et des comportements suicidaires pouvant mener jusqu'au passage à l'acte.

L'harcèlement peut pousser les victimes à commettre des gestes irréparables

Souvent les adultes ne comprennent pas pourquoi les jeunes s'envoient des photos d'eux nus ou très intimes. Ce qu'il se passe en réalité c'est que les jeunes se servent des réseaux sociaux comme s'il s'agissait d'espaces privés:  ils se livrent à des confidences et n'hésitent pas à y montrer des données très personnelles. Il est vraiment important de réaliser qu'il y a des limites qui séparent la vie publique de la vie privée et que les réseaux sociaux sont un moyen très facile pour faire passer dans le domaine public des choses qui devraient rester dans le domaine privé.

Un exemple parmi d'autres ? Les photos dites « soutcu», c'est-à-dire « soutien-culotte ». De quoi s'agit-il ? Les adolescentes ont l'habitude de s'envoyer des photos via Snapchat en cabine d'essayage pour demander l'avis de leurs copines sur le vêtement ou le sous-vêtement qu'elles essayent. La photo disparaît en principe après 10 secondes. Sauf si le destinataire fait une capture d'écran. Il existe aussi des sites qui permettent de retrouver la photo en passant par un serveur. Bref, comme tu vois, des photos que tu croyais innocentes et en sécurité peuvent vite devenir ton pire cauchemar.

*À la fin de l'article, tu trouveras toutes les différentes formes de cyberharcèlement.

Comment se protéger?

Pour éviter que cela ne t'arrive, voici quelques petits trucs utiles à garder en tête: 

  • Évite d'accepter des amitiés sur les réseaux sociaux avec des personnes que tu ne connais pas ou avec lesquelles tu n'as aucun ami en commun. Si tu reçois une demande en ami d'un étranger, décline l'invitation. Sur Facebook par exemple, il est simple de désactiver les demandes d'amitié.

  • Si tu es très actif sur les réseaux sociaux, assure-toi que tes publications ne soient pas en mode « public ». Tu peux même définir le public cible : uniquement tes amis, ou des personnes bien spécifiques.

  • Pense aussi à activer les paramètres de confidentialité sur tes réseaux sociaux et à vérifier si tes données personnelles sont bien protégées.

  • Ton Smartphone ou ton ordinateur sont des objets personnels. Il faut les protéger par un code PIN ou un mot de passe!

Éduquer ses parents

Il est difficile de comprendre quels sont les outils pour t'aider à faire face au cyberharcèlement. C'est le cas aussi bien des jeunes que des parents. Il faut que tu comprennes que tes parents appartiennent à la génération qui a découvert Internet et qui l'utilise depuis une petite vingtaine d'années. Ils ne sont pas au courant de toutes les nouvelles applications et réseaux sociaux. 

Nous savons qu'il est difficile de dialoguer avec tes parents sur certains sujets pour lesquels ils ont l'air complètement dépassés. Mais aujourd'hui, il est essentiel de leur expliquer l'utilisation des réseaux sociaux et d'Internet. Ces discussions sont importantes pour que tu te sentes en confiance pour en parler avec eux le jour où, malheureusement, tu rencontres des problèmes. En fait, il faut que tu éduques tes parents! C'est en les éduquant qu'ils deviendront tes alliés en cas de difficulté.

La pire réaction des parents en cas de cyberharcèlement c'est de diminuer ou interdire totalement l'accès à Internet. Ce n'est pas la meilleure solution car elle a pour conséquence d'isoler encore plus le jeune harcelé: c'est comme une double punition! De plus, il pourra quand-même être exposé aux moqueries, railleries, insultes sous une autre forme. En éduquant mieux tes parents au monde d'Internet et des réseaux sociaux, tu leur permettras aussi de mieux réagir en cas de souci.

Réagir face au cyberharcèlement

Tu es victime de cyberharcèlement? Comment réagir?
Sache qu'il n'y a pas de honte à avoir, que ça peut arriver à n'importe qui et que rien ne justifie le harcèlement. Le mieux est de prévenir un adulte en qui tu as confiance (professeur, éducateur, parent, frère ou soeur plus agé.e, etc.). 

Ensuite il est vraiment important de quitter immédiatement l'environnement ou l'activité en ligne où a lieu l'intimidation. Il faut aussi bloquer les messages d'une personne qui te harcèle constamment et ne pas y répondre. Si tu es harcelé dans un forum, sur un site ou un réseau social, change de pseudonyme. Au besoin, crée une nouvelle adresse mail et limite sa diffusion aux personnes en qui tu as confiance.

Le mieux est de demander à une personne adulte de t'aider à agir. Ce qu'il est utile de faire, c'est d'enregistrer tout message de harcèlement et le faire parvenir aux gestionnaires du site Internet en cause (Gmail, Facebook, Instagram, Snapchat, Twitter …). La plupart de ces sites ont une politique de sanctions à l'égard des utilisateurs qui font du harcèlement. 

Si tu es victime de menaces et que tu te sens dépassé.e, il faut absolument alerter la police. Cela peut sembler effrayant, mais c'est vraiment important de prendre cela au sérieux et de ne pas laisser cette situation te pourrir la vie. De plus, la police peut contacter le fournisseur d'accès internet qui pourra tenter de retrouver le lieu depuis lequel sont envoyés les messages via l'adresse IP. 

Tu trouveras ici quelques conseils et des numéros utiles de la Police en cas de cyberharcèlement.

Tu es témoin d'attaques envers une personne? Tu reçois des images/vidéos pouvant faire du tort à quelqu'un? Le mieux est de les supprimer pour stopper la diffusion. Surtout, ne partage pas, ne like pas et ne commente pas un contenu inapproprié; cela évitera de lui donner plus d'ampleur et de visibilité. Ensuite, essaie de signaler la situation dont tu es témoin. Tu peux également rassurer la victime, l'encourager à ne pas rester isolée, la protéger et lui apporter le soutien moral dont elle a besoin.

Tu ne te sens pas bien et tu as besoin de soutien, de réponses, d'avis ?

Rends-toi sans plus attendre dans notre question/réponse sur notre site !

Si tu as besoin d'aide, si tu souhaites t'exprimer, en anonyme ou non, si tu es victime de harcèlement, Paroles d'ados est là pour toi. N'hésite pas à les partager avec tout le monde sur notre site, dans l'onglet Forum !  

 

Les différentes formes de cyberharcèlement


Pour que tu puisses bien comprendre de quoi il s'agit, voila quelques formes de cyberharcèlement:

 «Flaming»: cette forme de harcèlement via les réseaux sociaux consiste en l'envoi de messages brefs très violents (insultes et vocabulaire vulgaire).  

 

«Harassment»: il s'agit d'un envoi répété de messages offensifs et violents. La quantité de messages envoyés (ou reçus) est bien plus importante que dans du flaming. Ici c'est le caractère répétitif qui prend toute son importance. 

 

«Denigration»: cette pratique s'entend comme l'ensemble des ragots, rumeurs, calomnies ainsi que toutes les atteintes portées à la réputation de quelqu'un. La «denigration» peut s'opérer sur des pages Facebook, sur des blogs ou même sur des sites Internet entièrement consacrés à la stigmatisation d'une personne.

 

 «Impersonation» ou «masquerade »: il s'agit de diverses formes d'usurpation d'identité à des fins malveillantes. Concrètement, cela consiste à emprunter le pseudonyme de quelqu'un pour insulter une autre personne. L'objectif est à la fois de nuire à la personne insultée mais également à la personne qui s'est fait emprunter son identité.  

 

«Exclusion» : il s'agit d'une pratique qui a pour but de mettre volontairement à l'écart du groupe une personne. Cette mise à l'écart peut avoir lieu sur les réseaux sociaux ou sur un site de jeux en ligne, par exemple.  

 

«Outing» ou «trickery» : il s'agit de l'ensemble des moyens par lesquels des informations à caractère intime ou confidentiel sont rendues publiques. Il peut s'agir de la divulgation d'un secret ou de la communication de documents embarrassants (par exemple, des photos intimes, des vidéos, etc.).  

 

«Cyberstalking»: ça ressemble à une traque sur un Internet. Méthodique et systématique, elle consiste à ne laisser aucun moment de paix à quelqu'un en multipliant les envois de messages injurieux ou la diffusion de documents gênants. Cette méthode est fréquemment utilisée suite à des ruptures amoureuses.

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